Accès
Accès en voiture
Prendre l'autoroute A9 jusqu'à Martigny, puis continuer sur la E27 en direction du Grand-Saint-Bernard. Poursuivre sur la route cantonale toujours en suivant les indications pour le Grand-St-Bernard.
Peu avant l'entrée du tunnel routier du Grand-Saint-Bernard, bifurquer à droite en direction du Col. Quelques centaines de mètres plus loin, on arrive à hauteur d'un vieux bâtiment orange noté "Super St-Bernard" avec un grand parking gratuit.
Accès en transports publics
Le point de départ est desservi par des cars postaux sur la ligne Orsières – Grand-St-Bernard.
Pour rejoindre Bourg Saint Bernard, prendre le train en direction du Châble au départ de Martigny. Descendre à Sembrancher et emprunter un deuxième train jusqu'à Orsières (terminus). Poursuivre le voyage en bus en direction du Grand-St-Bernard et descendre à l'arrêt Bourg-St-Bernard.
Consulter l'horaire en ligne des CFF pour trouver la meilleure correspondance.
De Bourg-Saint-Bernard à la Croix (P. 2815)
La première chose qui frappe en arrivant sur le grand parking est le bâtiment délabré du restaurant de l'ancien domaine skiable du Super-Saint-Bernard. La petite station, construite dans les années 1960, a vieilli et le manque d'investisseurs et de viabilité ont conduit à la faillite de la société en 2010. Le site est depuis à l'abandon, et Google Maps recense d'ailleurs le vieux restaurant comme la "Ruine Super-Saint-Bernard".
J'ai emprunté le sentier pédestre qui monte en direction de la Cabane du Plan du Jeu et contourné la ruine du restaurant par la droite. Vers 1980 mètres d'altitude, juste après avoir franchi un pont, j'ai quitté le chemin carrossable pour remonter les pentes herbeuses du pâturage des Darrays. J'ai longé les pylônes de l'ancien téléski, un itinéraire plus court et agréable que de passer par la cabane, de toute façon fermée ce jour-là pour cause de maladie.
Les premiers sifflements de marmottes n'ont pas tardé à se faire entendre dans la petite combe. Ces mammifères ont colonisé toute la défunte pente de ski et après une douzaine d'observations, j'ai arrêté de compter.
L'arrivée de l'ancien téléski culmine à 2270 mètres d'altitude. Elle paraissait proche, mais il a fallu son temps pour l'atteindre. L'endroit est défendu par une colline en amont en forme de U, un mur paravalanche qui protégeait autrefois la station en amont du téléski. Malgré cela, elle fut pourtant détruite par des avalanches ou des chutes de pierres.
Sur la gauche, un semblant de sente marquée par des traces de peinture délavée et des petits cairns franchit la colline. La suite est moins évidente. Il y a quelques cairns, mais dans l'herbe, j'ai perdu la piste. J'ai mis le cap sud-est et j'ai repéré d'autres cairns par la suite. La pente se redresse sérieusement, mais la seule difficulté technique est la recherche de l'itinéraire. J'ai remonté en zigzaguant sur l'ancienne moraine latérale mi-herbeuse, mi-rocheuse.
J'ai effectué toute la première partie de l'ascension à l'ombre, dans une fraîcheur agréable.
J'ai retrouvé un bon chemin (non répertorié sur les cartes topographiques) vers 2400 mètres d'altitude, à quelques dizaines de mètres du Torrent de Perche. Le sentier longe le cours d'eau jusqu'à environ 2500 mètres d'altitude, puis il remonte nord-est jusqu'à une épaule rocheuse. Sous les imposantes parois du Mont de Pro, on remonte jusqu'à un gros bloc sur lequel sont peintes une flèche et une croix en jaune (vers 2650 mètres d'altitude environ). C'est l'indication pour atteindre l'ornement érigé sur une petite pointe à proximité de P. 2816 en mémoire de deux alpinistes qui furent ensevelis par une avalanche en 2002.
Le chemin prend à droite dans une traversée montante. On longe de nouveau le bord du cours d'eau, que l'on suit jusqu'à atteindre un replat vers 2770 mètres d'altitude.
Traverser au mieux les cours d'eau créés par la fonte du Glacier de Pro, puis rejoindre P. 2816 par le nord-est. De là, la croix n'est plus qu'à quelques pas.
La vue s'étend sur la partie supérieure du Val d'Entremont, notamment sur le toit du tunnel du Grand-Saint-Bernard. Bien plus intéressant, l'on aperçoit quelques grandes cimes italiennes, françaises et suisses telles que les Grandes Jorasses et le Mont Dolent.
De la Croix (P. 2815) au Col d'Annibal
Depuis la croix, ni sente ni balisage ne sont visibles, mais le Col d'Annibal est bien apparent au sud-est (à gauche de Testa Grisa). Selon la carte topographique, on devrait mettre pied sur le glacier du Pro (anciennement écrit Proz), mais il ne reste plus qu'une longue moraine de récession, car du glacier subsistent seulement quelques traces au pied des pentes escarpées du Mont Vélan.
On remonte sur la plaine d'éboulis, jadis recouverte par le glacier, qui offre une vue saisissante des parois abruptes de la Dent de Pro, de l'Aiguille du Vélan et du Mont Vélan. Malgré l'absence de sentier et de balisage, le prochain objectif se dessine à l'horizon, et l'itinéraire se révèle assez évident.
Au-dessus de 2900 m, j'ai trouvé la langue terminale du glacier qui était recouverte de caillasse. J'ai contourné un énorme bloc rocheux (marqué sur les cartes topographiques) par la droite. En face, l'Arête d'Annibal qui conduit au Mont Vélan est impressionnante. Apparemment, quelques excursionnistes s'y aventurent sans équipement, mais elle semble techniquement exigeante et le sol paraît friable.
J'ai gravi un petit névé puis, par une dernière montée sur les éboulis instables, j'ai atteint le Col d'Annibal, situé sur la frontière italienne. La vue s'ouvre sur le vallon de Moline et la Vallée d'Aoste. Au loin, on aperçoit également le Mont Blanc, le Mont Maudit et la Pointe Walker des Grandes Jorasses. Depuis le col, la longue Arête d'Annibal, qui escalade d'abord l'Aiguille du Déjeuner avant de se prolonger jusqu'à l'antécime ouest du Mont Vélan, se montre encore plus impressionnante.
Selon une légende, le commandant en chef carthaginois Hannibal aurait franchi les Alpes avec ses éléphants par ce col, mais plusieurs cols des Alpes revendiquent cet honneur. Les vestiges d'un mur de 40 mètres (dont on peut encore aujourd'hui observer des restes) ainsi qu'une lance de bronze retrouvée en parfait état de conservation renforcent cette hypothèse. La configuration complexe du lieu, la proximité de l'effrayant Mont Vélan (à l'époque recouvert de glaciers) ainsi que l'altitude élevée contredisent cette supposition, d'autant plus que le col du Grand-St-Bernard n'est qu'à quelques kilomètres et est environ 500 mètres moins élevé.
Du Col d'Annibal à Testa Grisa
Du Col d'Annibal, suivre la crête composée d'éboulis généralement stables en direction nord-ouest. L'ascension est tranquille et sans difficulté particulière. Une petite pointe rocheuse bloque la progression, mais elle se contourne aisément par la gauche (côté italien) en descendant quelques mètres.
Une dernière courte montée donne ensuite accès au sommet de Testa Grisa, qui offre une superbe vue à 360 degrés sur les régions et cimes déjà susmentionnées, mais aussi sur le Mont Tunnel, le prochain objectif.
Les gros blocs qui trônent au sommet offrent un excellent endroit pour faire une pause tout en profitant du panorama. Pendant que je grignotais quelques noix, j'ai observé deux gypaètes barbus voltiger au-dessus de moi. Je me suis demandé s'ils m'avaient confondu avec une carcasse…
De Testa Grisa à la Pointe de Moline par le Mont Tunnel
Poursuivre sur l'arête sud-ouest de Testa Grisa, sans aucune difficulté technique notable. Rapidement, on gagne une modeste pointe, anonyme sur les cartes topographiques suisses, mais connue comme Pointe de Moline Est (3025) sur les cartes topographiques italiennes (IGM). Peu après, on rejoint le cairn du Mont Tunnel.
Continuer sur l'arête aisée en direction ouest jusqu'à la Pointe de Moline. Ce toponyme dérive du patois valdôtain et de l'ancien français "moline", qui signifie "moulin". "Moline" est la version valdôtaine, tandis que "Molenne" est la variante valaisanne.
L'histoire des noms de ces trois sommets est une véritable épopée lexicale. Autrefois connus sous l'appellation "Pointes de Moulena", ils ont subi plusieurs métamorphoses avant d'adopter leurs noms actuels. Testa Grisa et Mont Tunnel sont apparus respectivement dans les années 1970 et 1995, tandis que "Pointes de Molenne" a cédé sa place à "Pointe de Moline" en 2015.
Ces sommets se trouvent sur la frontière italo-suisse, et chaque pays les nomme de leur propre manière. Par exemple, la "Pointe de Moline" est connue comme "Pointe de Moline Ouest" en Italie, tandis que le "Mont Tunnel" est la "Pointe de Moline Centrale" là-bas. La petite cime entre le Mont Tunnel et Testa Grisa, anonyme en Suisse, est la "Pointe de Moline Est" pour les Italiens. Malgré toutes mes recherches, le lien avec un moulin reste pour moi un mystère.
De la Pointe de Moline à Bourg-Saint-Bernard
J'aurais aimé rejoindre le Col de Moline, mais la descente, cotée PD dans le livre du CAS, s'est révélée bien plus technique que prévu. N'étant pas en grande forme ce jour-là, j'ai opté pour la prudence.
Je me suis donc engagé sur l'arête rocheuse nord-nord-est de la Pointe de Moline. Jusqu'à environ 2870 mètres, le parcours est dégagé, mais au-delà, les éboulis instables prennent le relais. J'aurais pu tenter de traverser Les Fouéreuses, mais leur nom patois "fouairau, fouairausa", signifiant "foireux, qui a la diarrhée" et désigne des terrains fangeux et des cours d'eau boueux, ne m'inspirait guère confiance. J'ai donc préféré longer le flanc de la montagne, en conservant un cap nord-nord-est, jusqu'à retrouver la croix.
De retour à ce point, j'ai emprunté le même chemin pour redescendre. Durant cette journée solitaire, seule la présence de quelques marmottes a entrecoupé mon périple.