Accès

Accès en voiture

Prendre l'autoroute A9 jusqu'à Martigny, puis continuer sur la E27 en direction du Grand-Saint-Bernard. Peu avant l'entrée du tunnel routier du Grand-Saint-Bernard, bifurquer à droite en direction du col. Se garer sur un des parkings à proximité de l'hospice (côté suisse).

Accès en transports publics

Le point de départ est desservi par des cars postaux sur la ligne Orsières – Grand-Saint-Bernard.

Pour rejoindre l'hospice du Grand-Saint-Bernard, emprunter le train en direction du Châble au départ de Martigny. Descendre à Sembrancher et prendre un deuxième train jusqu'à Orsières (terminus). Poursuivre le voyage en bus en direction du Grand-St-Bernard et descendre au terminus.

Le nombre de liaisons rend néanmoins difficile l'accomplissement de la randonnée telle que décrite ici. Le premier car postal arrive à l'hospice du Grand-Saint-Bernard vers 10 heures, et le dernier bus quitte le col peu avant 17 heures, ce qui ne laisse que très peu de marge et aucune opportunité pour faire des pauses.

Consulter l'horaire en ligne des CFF pour trouver la meilleure correspondance.

Du Col du Grand-Saint-Bernard à P. 2791

La Pointe de Drône et les Lacs de Fenêtre sont des destinations très renommées, ce qui signifie qu'elles sont également très fréquentées. Afin de pouvoir profiter de ces endroits sans être gêné par la foule, je suis arrivé au parking du col du Grand-Saint-Bernard vers 8 heures du matin.

Le parcours peut être réalisé dans les deux sens, mais personnellement, j'ai choisi de l'effectuer en sens horaire, car je favorise la partie technique à la montée et en début de randonnée.

À cette heure matinale, le soleil illuminait déjà le col, pourtant il était encore paisible et silencieux. C'était inhabituel, car d'ordinaire, il y a toujours un va-et-vient de visiteurs et de visiteuses.

Traverser le col puis, au nord-ouest de l'hospice, emprunter la petite route asphaltée qui monte sur la droite (vers le nord) en longeant le bâtiment. Quelques dizaines de mètres plus loin, on atteint un poteau indicateur. Le premier objectif de la journée, à savoir le sommet de la Grande Chenalette, n'y était pas mentionné. Curieusement, les responsables du balisage ont préféré mettre en avance les Lacs de Fenêtre. Un autre fait intéressant est que la Pointe de Drône était encore balisée en blanc–rouge–blanc, bien que la cotation ait été changée de T3 à T4 il y a plusieurs années déjà.

Une dizaine de Hollandais et de Hollandaises, qui avaient sans doute passé la nuit à l'hospice, se préparaient pour la marche. L'idée de partir tôt était également de pouvoir observer des animaux sauvages, mais ces randonneurs et randonneuses étaient particulièrement bruyants, ce qui aurait alerté les bêtes. J'ai accéléré le pas pour prendre de la distance par rapport au groupe.

La route asphaltée se transforme rapidement en chemin, et le balisage blanc–rouge–blanc est omniprésent. On passe à côté d'une petite cabane avec un drapeau suisse, qui était le départ du télésiège de la Chenalette, en service de 1954 à 1986.

Le Lac du Grand-Saint-Bernard, en grande partie encore à l'ombre, ainsi que le côté italien sont apparus en contrebas. Le paysage était déjà magnifique, mais je savais que ce n'est qu'un avant-goût…

En remontant dans la large combe, j'ai alterné entre des sections ensoleillées et ombragées. La température était fraîche et agréable. Je compatissais à l'égard de ceux et celles qui allaient passer la journée en plaine sous les chaleurs annoncées.

Un regard en arrière m'a offert une belle vue sur l'hospice et le lac, tous les deux dominés par les abruptes parois rocheuses du Petit Mont Mort. La route était encore silencieuse, un privilège assez rare. L'herbe jaunissait déjà, mais cela n'était guère étonnant compte tenu de l'été particulièrement chaud et sec. J'ai savouré cette ambiance préautomnale dans la quiétude matinale.

À une altitude d'environ 2615 mètres, on traverse une épaule rocheuse, et le sommet de la Grande Chenalette apparaît au-dessus. La pente se redresse ensuite légèrement. J'ai entendu plusieurs sifflements aigus, mais malheureusement, je n'ai pas réussi à repérer les marmottes.

On poursuit l'ascension sur le versant sud-est de la Grande Chenalette. Le sentier grimpe en faisant des courts zigzags. J'ai aperçu quelqu'un sur l'arête est de la Grande Chenalette. Eh ben, cela confirmait que je n'aurais pas été seul sur le parcours.

Après avoir traversé une section plus rocheuse, on atteint un petit replat vers 2790 mètres d'altitude sur l'épaule sud de la Grande Chenalette, où quelques vestiges de l'arrivée du télésiège subsistaient. Lors de son inauguration le 6 juillet 1954, il était considéré comme le plus haut du monde. Des sièges individuels transportaient les passagers et passagères du col du Grand-Saint-Bernard à presque 2800 mètres en moins de huit minutes.

On parvient souvent à trouver l'argent pour construire des installations plus ou moins impressionnantes, mais très rarement (pour ne pas dire jamais) pour les démanteler après leur fermeture. C'est également le cas des installations du Super Saint-Bernard situées à quelques kilomètres de distance… On peut dire qu'en cas de mauvais temps, il sert d'abri, mais cette randonnée dans ces conditions serait un vrai gâchis, car il n'y aurait aucune vue.

Une petite plateforme en ciment, avec un panneau semi-circulaire comportant les noms des montagnes, offre un panorama à couper le souffle. À l'ouest, quelques "monstres" des Alpes, tels que le Mont Blanc et le Mont Dolent, apparaissaient dans toute leur splendeur. Ce n'était pas le cas à l'est, où le Grand Combin de Grafeneire et le Mont Velan étaient à contre-jour. Les premiers vrombissements de motos et de voitures sportives me sont parvenus. Je ne me suis pas trop attardé, car le paysage aurait été bien meilleur en prenant de l'altitude…

De P. 2791 à la Grande Chenalette

En regardant vers le nord, on repère facilement le poteau qui trône au sommet de la Grande Chenalette, environ 90 mètres plus haut. L'itinéraire à emprunter dans la rocaille est, en revanche, bien plus compliqué à déterminer, mais un balisage blanc–bleu–blanc indique la direction à suivre.

Lors de ma précédente visite en septembre 2009, la signalisation était blanc–rouge–blanc, ce qui ne reflétait pas la difficulté du tronçon. Le marquage a depuis été ajusté en conséquence, car plusieurs touristes avaient été pris au dépourvu par le côté aérien de la suite du parcours…

Suivre le balisage qui longe la crête rocheuse. Traverser ensuite la face sud de la Grande Chenalette, dans laquelle poussaient des plantes de Génépi.

Quelques crapahutages ludiques mais faciles sur le rocher, nécessitant l'utilisation des mains pour l'équilibre, montrent déjà le degré de difficulté supérieur du chemin.

On arrive ainsi au passage technique qui mène au sommet de la Grande Chenalette. L'ensemble est largement équipé de cordes, de chaînes, de barreaux métalliques et d'échelles, et ressemble à une via ferrata, mais il n'y a pas de "ligne de vie" continue. Le baudrier, la longe et le casque ne sont par conséquent d'aucune utilité.

Le matériel est, d'une manière générale, en bon état. Certaines échelles ont été posées de biais, mais contrairement aux apparences, elles sont solidement fixées au rocher. J'ai néanmoins remarqué deux points d'ancrage cassés. Pensez donc à vérifier l'état de l'équipement avant de vous y aventurer!

Bien que l'infrastructure installée permette d'éviter quelques pas d'escalade faciles, le tronçon reste délicat et légèrement exposé, nécessitant un pied sûr et de ne pas être sujet au vertige. Il n'est pas recommandé par temps humide, enneigé ou lors de conditions orageuses.

Un poteau métallique, orné de drapeaux de prière népalais délabrés, suggère que le sommet n'est plus qu'à quelques pas. La Grande Chenalette culmine à 2890 mètres d'altitude, mais quelqu'un a décidé autrement en peignant "2900 m" sur un rocher. Cet oronyme est un diminutif dérivant du vieux français "chanallet" et signifie "canal, chenal, chéneau, fossé". Il indique un couloir de montagne en pente raide ou une combe étroite.

De la Grande Chenalette à la Pointe de Drône

La Pointe de Drône, à seulement quelques centaines de mètres à vol d'oiseau au nord-ouest, semblait toute proche. Cependant, la crête qui la sépare de la Grande Chenalette n'est pas vraiment plate, et il faut plus de temps de ce que l'on pourrait penser pour la traverser!

Un câble métallique sécurise la descente sur des dalles inclinées depuis le sommet de la Grande Chenalette. Pour ma part, je n'ai pas utilisé cet équipement, car j'ai trouvé plus facile de passer à quelques mètres de là…

Un sentier partiellement visible serpente ensuite entre les pierres. Le balisage et les cairns jalonnent le parcours, ne laissant aucune incertitude quant à la direction à suivre. Parmi les traces blanc–bleu–blanc (T4), on peut encore observer quelques marques délavées de l'ancien balisage blanc–rouge–blanc (T3).

Un ressaut de quelques mètres se franchit à l'aide d'un câble métallique. Un peu plus loin, la traversée d'une petite paroi rocheuse sur une vire a aussi été sécurisée de la même manière. Les deux passages sont légèrement exposés, mais techniquement ils sont bien plus faciles que l'ascension de la Grande Chenalette.

Une dernière montée sans difficulté mène au sommet de la Pointe de Drône, marqué par un poteau métallique qui, à une époque, hissait un drapeau suisse. Cet oronyme pourrait venir du latin "dracona", la forme féminine de "draco", signifiant "dragon", un animal fabuleux, démon malfaisant des eaux.

À peine une heure et demie après le départ, j'avais déjà atteint le point culminant de la randonnée, pourtant l'excursion était loin d'être terminée. C'est sans doute le seul inconvénient à suivre l'itinéraire dans le sens décrit ici… Cette pensée disparaît rapidement face au panorama époustouflant à 360 degrés sur les majeures cimes italiennes, françaises et suisses: le Mont Blanc, les Grandes Jorasses et les différentes Aiguilles jusqu'au Mont Dolent pour ne citer que les plus connues. Les célèbres Lacs de Fenêtre apparaissent également en contrebas, mais de cet endroit on ne voit que les deux les plus grands. On découvre d'autres lacs dans la partie supérieure de la Combe de Drône: le Grand Lé, le Petit Lé et la Gouille du Grand Lé. Ils sont moins notoires que les trois, mais ils ne sont pas moins beaux. À noter que le terme "" est issu du patois valaisan et signifie "lac". Les nommer "Lacs de Lé", ou des variantes similaires que l'on retrouve sur certains topos est donc un pléonasme.

De la Pointe de Drône à P. 2861

Après une courte traversée sur une crête rocheuse, étroite et aérienne, on atteint l'antécime occidentale de la Pointe de Drône.

Descendre le long de l'arête ouest, qui est abrupte et toujours légèrement vertigineuse. Le terrain se compose de gros blocs ainsi que de caillasse parfois instable, mais le chemin est bien marqué et en général l'itinéraire est évident. Le balisage est aussi présent, ce qui simplifie la progression.

Des chaînes ont été installées pour faciliter le franchissement des ressauts exposés. Lorsque le rocher est sec, leur utilisation n'est pas vraiment nécessaire, mais elles sont certainement très pratiques quand il est humide ou gelé.

On retrouve ensuite un sentier plus conventionnel, mais on ne le longe que sur une courte distance. Rapidement, on gagne en effet un petit replat où l'arête ouest de la Pointe de Drône se divise en deux (P. 2681).

De P. 2861 à la Pointe des Trois Lacs

Le sentier balisé se poursuit le long de l'arête ouest-sud-ouest (à gauche), comme indiqué par une flèche peinte sur une pierre au sol, jusqu'à atteindre la Fenêtre d'en Haut. Cependant, il était temps pour moi de quitter les chemins battus et de partir à l'aventure. J'ai donc pris à droite sur la crête nord-nord-ouest de la Pointe de Drône, connue sous le nom de Les Bastillons. Ce toponyme dérive, par métaphore, du mot "bastille", un ouvrage de fortification bâti pour défendre un endroit. En effet, les falaises du versant ouest de cette arête ressemblent à une véritable forteresse…

Une vague sente suit Les Bastillons. Je n'ai pas eu à marcher longtemps avant de pouvoir contempler les trois Lacs de Fenêtre au complet. J'ai compté une douzaine de tentes installées sur le plateau de ces lacs. L'endroit est déjà très beau en soi, mais avec les Alpes en arrière-plan, c'est tout simplement sublime, et il n'est pas étonnant qu'il soit si prisé. Je n'ose même pas imaginer l'affluence pendant les week-ends de juillet et août…

La descente ne présente aucune difficulté particulière, me permettant ainsi de profiter pleinement du majestueux paysage avec ses sept étendues d'eau. Le plateau supérieur de la Combe de Drône comporte également un lac sans nom, et j'ai laissé de côté les gouilles qui étaient à sec à cette période…

Un faux plat suivi d'une courte montée permet d'atteindre le petit cairn qui marque la Pointe des Trois Lacs, anciennement appelée Pointe du Bastillon.

De la Pointe des Trois Lacs au Col des Trois Lacs

Le parcours en direction du Col des Trois Lacs devient plus raide et technique. Rester sur le fil de l'arête et contourner les obstacles, tantôt à droite, tantôt à gauche.

Un ressaut légèrement aérien et exposé nécessite des pas de désescalade facile (II). Il est similaire à ceux franchis pendant la descente de la Pointe de Drône en direction de la Fenêtre d'en Haut, a une différence près: celui-ci n'était pas équipé de chaînes…

La difficulté de la randonnée (T5-) réside principalement dans ce ressaut, ainsi que quelques autres passages à outrepasser pour atteindre le col du Bastillon.

Du Col des Trois Lacs au Col du Bastillon

J'ai compris que j'étais arrivé au Col des Trois Lacs, car c'était le point le plus bas sur l'arête. À part cela, il n'y a pas de repères particuliers.

Je grignotais quelques noix lorsque de faibles cris me sont parvenus. Des jeunes bravaient les eaux d'un des Lacs de Fenêtre et les hurlements m'ont laissé supposer que l'eau devait être bien froide!

Plusieurs dalles inclinées que l'on ne pouvait pas contourner bloquaient le parcours sur la crête. Elles étaient légèrement exposées, mais elles offraient de bonnes prises pour les pieds. Lorsque le rocher est sec, on peut les escalader sans trop de difficultés. Cependant, je ne voudrais pas avoir à les traverser si elles sont humides, ou recouvertes de neige ou de plaques de glace…

De nombreuses proéminences rocheuses infranchissables parsemaient la suite de l'arête, mais il était possible de les contourner facilement par le versant est.

Le brouhaha des conversations des randonneurs et randonneuses s'amplifiait à mesure que je m'approchais du Col du Bastillon. Jusqu'au milieu des années 1970, ce passage portait le nom de Col des Chevaux. Il ne faut pas le confondre avec l'actuel Pas des Chevaux, situé sur l'arête entre la Grande Chenalette et la Pointe des Lacerandes, qui a été appelé Col des Cheveaux entre 1975 et 1995 environ, et qui n'avait pas de nom auparavant. Il ne faut pas non plus le mélanger avec le Chemin des Chevaux (anciennement Chemin des Cavalles) qui est le sentier reliant la Combe de Drône à l'actuel Pas des Chevaux.

Toutes ces références aux équidés sont liées au fait que l'Hospice du Grand-Saint-Bernard possédait des droits d'affouage dans le Val Ferret. Le bois de chauffage était transporté à dos de cheval par le Col du Bastillon, le Chemin des Chevaux et le Pas des Chevaux. Les droits d'exploitation de la matière première ont pris fin en 1890, mais le nom est resté.

Du Col du Bastillon aux Monts Telliers

Le Col du Bastillon lui-même est un passage au sein de l'arête rocheuse et n'offre pas de vue exceptionnelle. À proximité, les rares endroits accueillants avec de beaux panoramas étaient déjà occupés. J'ai donc poursuivi ma route en direction des Monts Telliers, deux sommets situés au nord et formant une imposante masse rocheuse. Ils sont très prisés pour le ski en hiver, mais en été, ils sont peu fréquentés, probablement en raison de l'absence de chemin et du caractère ardu de l'itinéraire menant à la cime principale.

J'ai continué le long de l'arête jusqu'à atteindre une bouche à feu d'une ancienne installation militaire construite à l'intérieur de la montagne. Malheureusement, je n'ai pas pu trouver d'informations sur ce bunker ni localiser son entrée.

J'ai grimpé sur les dalles à gauche de l'ouverture. Par un itinéraire en S et quelques pas d'escalade facile (I-II), j'ai gagné un replat gazonné. La suite de la marche sur les pentes herbeuse le long de la crête était plus agréable. J'ai contourné les dalles successives en restant sur l'herbe sans trop m'éloigner du bord. Par moments, on peut emprunter une vague sente, et quelques cairns aident à trouver le cheminement optimal, mais un bon sens de l'orientation est nécessaire pour progresser.

Un gypaète barbu plainait au-dessus de ma tête, mais quand il a compris que je n'étais pas une charogne, il s'est envolé en direction du Val Ferret.

Vers 2900 mètres d'altitude, la pente s'accentue. Remonter de gauche à droite sur en terrain composé d'un mélange de graviers et de pierrailles qui n'était pas très stable. J'étais content d'avoir mes bâtons, qui ont bien contribué à garder l'équilibre.

Traverser une tâche herbeuse pour accéder à l'arête est-nord-est, que l'on suit sans difficulté particulière jusqu'au sommet principal des Monts Telliers, marqué par un minuscule cairn. L'origine de cet oronyme demeure incertaine. Il pourrait s'agir d'une déglutination (c'est-à-dire une erreur de découpage due à une mauvaise compréhension du mot) de "Montelliets", qui signifie "colline, terrain bosselé, petit mont". Un autre fait intéressant est que ce sommet était orthographié "Mont Teilliers" sur les cartes topographiques au 1:50000 du début du 21e siècle, avant de retrouver son nom d'origine une dizaine d'années plus tard.

Au final, l'ascension s'est révélée moins difficile qu'elle ne paraissait. Du sommet, une vue magnifique s'offrait sur la Chaux des Planards et ses nombreux lacs. Les Echessettes se dessinent en arrière-plan, une superbe arête que j'avais exploré environ deux mois auparavant. De là, on pouvait aussi contempler la Pointe de Drône et l'intégralité de l'arête des Bastillons. À l'est, le Mont Velan et le massif des Combins étaient désormais splendidement illuminés par le soleil. Bien entendu, le panorama sur le Mont Blanc, les Grandes Jorasses et les différentes Aiguilles jusqu'au Mont Dolent était toujours spectaculaire. Cependant, la face sud de ce dernier était partiellement cachée par le sommet nord-ouest des Monts Telliers. J'ai donc décidé de le rejoindre, espérant pouvoir bénéficier d'un horizon plus dégagé.

Les deux cimes sont distantes d'environ 150 mètres et sont reliées par une arête rocheuse. Depuis le sommet principal, un petit ressaut rend impossible la progression directe le long de la crête nord-ouest. La seule option est de le contourner par la face nord, dont le terrain était très délité. Le parcours redevient plus tranquille dès qu'on récupère l'arête.

Le sommet nord-ouest n'était pas marqué, mais offrait effectivement un paysage plus dégagé. En observant attentivement, j'ai réussi à repérer le Bivouac du Mont Dolent, mais je n'ai pas pu localiser la Cabane de l'A Neuve.

Des Monts Telliers à la Gouille du Grand Lé

Après être retourné au sommet principal en empruntant le même itinéraire qu'à l'aller, j'ai observé en direction de la Pointe de Drône. Plus précisément, j'ai examiné le Pas des Chevaux, situé à sa gauche. J'ai pu distinguer deux sentiers qui mènent à ce col…

Le premier itinéraire est le chemin balisé qui passe entre le Grand Lé et le Petit Lé, descend dans la Combe du Drône jusqu'à une altitude d'environ 2400 mètres, puis monte par des lacets directement sous le col lui-même. Il est désigné sous le nom de "Chemin des Chevaux" sur les cartes topographiques, et il est également appelé sentier inférieur. Il est très fréquenté, mais en plus, il perd considérablement d'altitude avant de remonter.

La deuxième option, connue sous le nom de sentier supérieur, est l'ancien chemin pédestre. Il traverse le flanc de la montagne en gardant une altitude assez constante autour de 2600 mètres. Bien qu'il ne soit plus officiellement entretenu en raison de sa difficulté à se maintenir, et malgré qu'il ne soit plus balisé, il semblait toujours être emprunté. En effet, j'ai étudié le parcours à l'aide du zoom de mon appareil photo, et à première vue, le sentier paraissait praticable au moins jusqu'à atteindre l'arête nord-est de la Pointe de Drône. Après une section cachée derrière la montagne, j'ai identifié un autre passage qui semblait également accessible. En revanche, je n'ai pas réussi à évaluer la portion qui rejoint le chemin balisé juste sous le col, et qui n'est pas non plus indiquée sur les cartes topographiques.

Mon intérêt penchait en faveur de cette deuxième variante, mais je me suis laissé le temps de la descente jusqu'à la Gouille du Grand Lé pour prendre une décision définitive.

Depuis le sommet principal des Monts Telliers, j'ai suivi le même itinéraire qu'à la montée jusqu'au replat gazonné vers 2820 mètres d'altitude, puis j'ai dévalé sur la rocaille instable.

Il n'était que 13 heures lorsque j'ai atteint le bord du petit lac. La surface calme reflétait magnifiquement le massif des Combins et le Mont Velan. Les jeunes qui s'étaient baignés le matin dans l'un des Lacs de Fenêtre m'avaient donné envie de tremper les pieds dans l'eau, qui était effectivement très fraîche…

De la Gouille du Grand Lé au Pas des Chevaux par l'Ancien Chemin

Après cette pause revigorante, j'ai continué en direction du Pas des Chevaux. Je n'avais aucune motivation de me retrouver au milieu du va-et-vient de randonneurs et de randonneuses, et j'étais encore moins stimulé par le dénivelé supplémentaire engendré par le sentier inférieur…

Depuis Gouille du Grand Lé, j'ai donc mis le cap au sud, en direction du petit lac (sans nom sur les cartes topographiques). Après avoir traversé le chemin balisé, j'ai suivi la sente assez bien marquée qui passe à l'est de la surface d'eau. On arrive très vite au sommet d'une croupe herbeuse, qui offre un superbe panorama le Petit Lé et le Grand Lé.

À ma grande surprise, le sentier était très bien visible, et des cairns ainsi que des traces de balisage blanc–rouge–blanc délavées jalonnaient le parcours. On progresse à flanc de coteau dans les éboulis du versant est de la Pointe des Trois Lacs. Mis à part quelques courts tronçons légèrement ravinés, la première partie ne présente aucune difficulté technique particulière.

Une section dans le rocher mène à P. 2580. De vieux câbles bien rouillés, qui sécurisaient à une époque le passage, étaient encore en place, mais ils n'inspiraient aucune confiance. Quoi qu'il en soit, par temps sec, leur utilité est discutable, et par temps humide, je déconseille vivement d'emprunter le sentier supérieur en raison des risques de chutes de pierres.

Environ 500 mètres plus loin, pour atteindre la brèche dans l'arête nord-est de la Pointe du Drône, j'ai dû redoubler de prudence. Le terrain s'était complètement affaissé, et il n'y avait presque plus de trace sur une vingtaine de mètres. Un pied sûr est indispensable pour franchir ce passage, et des bâtons peuvent grandement faciliter la tâche.

Un joli sentier agréable traverse ensuite une combe rocailleuse en légère montée. Des bruits de chutes de pierres tout près ont attiré toute mon attention. J'ai avancé doucement tout en scrutant les pentes au-dessus de moi. Quelques pas plus loin, j'ai pu identifier la source des chutes de cailloux: une étagne et son cabri.

De l'autre côté de la combe, la procession de randonneurs et de randonneuses sur le chemin balisé continuait des plus belles.

Le terrain sous l'arête nord-est de la Grande Chenalette était escarpé, et il ne restait que peu de traces de l'ancien parcours. Des cairns marquaient l'itinéraire le moins scabreux à suivre pour rejoindre le sentier balisé. Remonter ce dernier jusqu'à atteindre rapidement le Pas des Chevaux.

Du Pas des Chevaux à la Pointe des Lacerandes

La Pointe des Lacerandes est une cime située à seulement quelques centaines de mètres au nord-est du Pas des Chevaux. Un sentier bien marqué et agréable, qui n'est pas indiqué sur les cartes topographiques, suit la large arête et mène au vaste plateau sommital en moins d'un quart d'heure. Une statue de la Vierge a été placée en haut d'un gros bloc rocheux, que l'on peut gravir avec quelques pas d'escalade très faciles (I).

Le nom de ce sommet est monté du lieu-dit situé au nord-est de la Pointe. "Lacerandes" dérive de "La Cerande" par agglutination de l'article. "Cerande" est un mot patois qui signifie "endroit où l'on donne aux vaches leur repas du soir".

L'emplacement offre une vue imprenable sur la partie supérieure du Val d'Entremont, avec le Lac des Toules, le massif des Combins et le Mont Vélan en premier plan.

De la Pointe des Lacerandes au Col du Grand-Saint-Bernard

Après être retourné au Pas des Chevaux par le même itinéraire qu'à la montée, j'ai jeté un dernier regard sur les superbes sommets du Val Ferret, puis j'ai entamé la descente en direction du Col du Grand-Saint-Bernard.

Le sentier traverse encore des pierriers avec toute sorte de caillasse, mais il était très bien aménagé, large et confortable. Dès que j'ai passé l'arête est de la Grande Chenalette, les bruits des véhicules sur la route dans la Combe des Morts sont devenus infernaux.

Quelques mètres avant de rejoindre la route asphaltée, j'ai croisé deux hommes vêtus de costumes traditionnels qui promenaient trois Saint-Bernards. Pour comprendre pourquoi ces énormes chiens, qui portent le nom du col, étaient baladés par ces hommes folkloriques, il faut plonger un peu dans l'histoire…

Saint Bernard d'Aoste (aussi surnommé de Menthon ou du Mont-Joux), archidiacre d'Aoste, voyait régulièrement des voyageurs arriver terrorisés et détroussés. Dans le but de mettre fin aux brigandages dans la montagne, il fonda un hospice au col du Grand-Saint-Bernard (alors nommé Mont-Joux) vers 1050. Au fil du temps, il est devenu célèbre pour son hospitalité légendaire. Ses portes sont d'ailleurs, encore aujourd'hui, ouvertes à tous ceux et celles qui passent.

Dans les années 1660-1670, les religieux de l'hospice ont croisé des chiens qui appartenaient vraisemblablement à une race de nos jours disparue, le mastiff alpin, afin de lui enlever sa férocité. L'élevage avait initialement pour but de fournir des chiens de garde à l'hospice. Ce n'est que plus tard qu'ils ont été utilisés pour les secours en montagne. L'élevage a été transféré à la fondation Barry, située à Martigny, en 2004. Elle s'est engagée à préserver la sous-espèce et à laisser des chiens à l'hospice pendant l'été.

J'ai marché sur la route asphaltée aux côtés de ces chiens à la stature impressionnante jusqu'au col.