Accès
Accès en voiture
Prendre l'autoroute A9 jusqu'à la sortie Aigle, puis suivre les indications direction Les Diablerets. Traverser le village, puis poursuivre jusqu'au Col du Pillon. Un vaste parking gratuit est à disposition autour de la station du téléphérique "Glacier 3000".
Accès en transports publics
Le village des Diablerets est desservi par des trains au départ de la gare CFF d'Aigle. Une ligne de bus assure ensuite une liaison régulière entre Les Diablerets et le Col du Pillon.
Pour trouver la meilleure correspondance, consulter l'horaire en ligne des CFF.
Du Col du Pillon au Lac Retaud
Ce vendredi matin, le vaste parking entourant les bâtiments du téléphérique Glacier 3000 était désert, plongé dans un silence hivernal presque irréel. Un panneau informatif indiquait aux visiteurs que les remontées mécaniques ne seraient pas mises en service de la journée, vraisemblablement en raison des violentes rafales de vent en altitude. Depuis le col, je pouvais en effet distinguer clairement la neige soulevée en tourbillons hypnotiques sur les crêtes environnantes, créant un spectacle aussi beau que menaçant.
Le secteur, encore plongé dans l'ombre, dégageait une froideur mordante qui s'infiltrait jusque dans les os. Je m'étais équipé rapidement, afin de me mettre en marche sans perdre une minute et me réchauffer par l'effort physique. Sac sur le dos, j'ai traversé d'un pas vif le parking en direction nord, jusqu'à apercevoir un poteau signalétique du tourisme pédestre qui se dressait solitaire.
Caché par un tas de neige, un petit groupe de personnes équipées de ski de randonnée s'apprêtait à partir à l'assaut des sommets. Après les avoir salués d'un signe amical, je me suis éloigné de quelques dizaines de mètres pour enfiler mes raquettes. En effet, la couche de neige poudreuse tombée abondamment les jours précédents rendait désormais la progression à pied trop pénible.
Le début de l'ascension, pentu, était tout sauf un départ tranquille, mais il avait le mérite de réchauffer mes muscles dès les premiers pas. Alors qu'une trace de ski montait en élégants lacets, j'ai opté pour une trajectoire plus directe, évitant ainsi de piétiner le sillon laissé par les skieurs qui m'avaient précédé.
Arrivé à la lisière d'une clairière (P. 1591), j'ai noté que les empreintes poursuivaient vers le nord-est, épousant le sentier estival, alors invisible sous la neige. Préférant l'originalité et l'aventure hors des sentiers battus, j'ai bifurqué en direction nord, empruntant une large épaule recouverte d'un manteau neigeux immaculé. Face à moi, le sommet de La Palette arborait une magnifique lumière dorée étincelante sous le soleil levant, tandis que le ciel d'un bleu intense et profond présageait une journée radieuse.
La pente s'est progressivement adoucie et les premiers chalets de l'alpage de Retaud n'ont pas tardé à apparaître dans mon champ de vision. Après les avoir dépassés, quelques enjambées ont suffi pour découvrir le petit lac Retaud, entièrement enseveli sous la neige et la glace hivernales. L'idée de le traverser m'a effleuré l'esprit, mais afin de ne pas perdre de temps à vérifier la stabilité de la couche de glace juste pour une distance aussi courte (le lac ne mesure qu'environ 100 mètres de long), j'y ai finalement renoncé. En effet, pour s'aventurer sur un lac gelé en toute sécurité, plusieurs conditions s'avèrent bel et bien nécessaires: une série de nuits au cours desquelles les températures inférieures à -15 °C, des jours sans dégel et une couche glacée d'au moins 7 à 10 cm d'épaisseur. Pour un groupe, ce seuil doit impérativement atteindre au moins 15 cm.
Du Lac Retaud au Plateau d'Isenau
J'ai emprunté un large chemin situé à l'ouest de l'Auberge-Restaurant du Lac Retaud et j'ai continué vers le nord-ouest en suivant le sentier pédestre. Une trace bien marquée, laissée par des skieurs en peau de phoque, ne laissait planer aucun doute quant à l'itinéraire à suivre dans cette étendue blanche.
Peu avant que la piste ne s'enfonce dans la forêt, j'ai décidé de m'en écarter afin de poursuivre en direction nord-nord-ouest, attiré par quelques silhouettes de skieurs qui semblaient privilégier un itinéraire qui paraissait bien plus intéressant et prometteur.
Par une série de larges lacets qui serpentaient sur la pente, je suis parvenu sur l'arête sud-ouest de La Palette vers 1870 mètres d'altitude, non loin de l'arrivée d'un téléski désormais désaffecté et livré aux éléments. C'est alors que je me suis remémoré le passé du domaine skiable d'Isenau. En activité jusqu'en 2017, ce site avait autrefois émerveillé la région grâce à sa télécabine aux "œufs rouges", devenue une véritable icône locale. Cependant, l'usure et le temps ont eu raison de cette installation emblématique, qui fut contrainte à la fermeture malgré l'attachement des habitants. Depuis, plusieurs projets de remplacement ont vu le jour, les propositions les plus récentes ayant été présentées au public début 2025. Mais pour l'instant, la "cuvette à neige", surnom local particulièrement évocateur et poétique, n'accueille plus que des skieurs et des randonneurs en raquettes, avides d'espaces vierges et de tranquillité que seule la montagne peut offrir.
Le plateau d'Isenau s'étendait désormais devant moi, immense, silencieux, revêtu d'un blanc immaculé et dominé par La Chaux qui s'élevait fièrement à l'horizon. Au sud, le massif des Diablerets se révélait dans toute sa splendeur, bien que demeurant encore plongé dans l'ombre. Sur les crêtes lointaines, d'éphémères nuages de neige continuaient de virevolter, portés par le vent – un spectacle envoûtant et fascinant qui captivait le regard et nourrissait l'imagination. Je me suis alors demandé, avec une pointe d'inquiétude, si le sommet de Floriette subissait lui aussi ces mêmes rafales impétueuses…
En contrebas, la route d'alpage, empruntée par les randonneurs en été, se dessinait à travers les courbes blanches, mais je voulais éviter de descendre, car cela aurait inéluctablement signifié devoir tout remonter par la suite. Le risque d'avalanche étant considéré comme "limité" selon les bulletins consultés ce matin-là, j'ai opté sans hésiter pour une traversée directe du flanc ouest de La Palette, suivant l'exemple de skieurs passés par là avant moi. En maintenant une altitude proche de 1870 mètres, j'ai progressé jusqu'à arriver au-dessus des chalets d'Isenau.
Du Plateau d'Isenau à Floriette
Le sommet de Floriette, l'objectif de la journée, était nettement visible devant moi, au nord, mais il ne s'attaquait pas directement. J'ai donc poursuivi ma marche vers le nord-nord-est, tantôt face à la pente, tantôt en longeant la trace sinueuse des skieurs, jusqu'à atteindre 2000 mètres d'altitude. Là, la marque des peaux continuait son inexorable ascension en direction du Col des Andérets. Quant à moi, j'ai préféré suivre les pylônes du téléski, alors même que le vent redouté se levait brusquement, soulevant parfois la neige en rafales horizontales qui fouettaient violemment le visage.
Au niveau du terminus du téléski, la pente s'est raidie, et l'intensité du vent s'est déchaînée davantage. Malgré ces conditions loin d'être agréables, j'ai continué l'ascension jusqu'à rejoindre la crête sud-est de Floriette. Là-haut, les rafales sont devenues si violentes que certaines me faisaient vaciller, transformant chaque pas en véritable défi d'équilibre et de persévérance. Cependant, l'épaule était suffisamment large pour rendre la progression sans danger objectif, même en cas de perte d'équilibre momentanée.
Tant bien que mal, j'ai remonté la crête parsemée d'îlots d'herbe jaunie, confirmant ainsi la puissance et la constance du vent en ces lieux exposés. J'ai franchi une borne-frontière en pierre, marquant discrètement la limite entre les cantons de Vaud et de Berne, et quelques enjambées plus tard, j'ai foulé enfin le sommet de Floriette, sans croix ni cairn, mais offrant une vue à couper le souffle qui récompensait largement tous mes efforts fournis jusque-là. Au nord-est, la combe de l'Arne, avec son lac gelé, était superbe et paisible dans son écrin immaculé. À l'horizon, l'Eiger et la Jungfrau se découpaient avec netteté, tandis que le Spitzhorn, sa face nord-est plongeant vertigineusement vers Gsteig (caché par le Walighürli), impressionnait par son austérité et sa verticalité intimidante. Au sud, le massif des Diablerets se dressait, imposant et majestueux dans sa grandeur naturelle. À l'est, j'avais une vue imprenable sur La Chaux, où plusieurs groupes de skieurs gravissaient la pente dans une chorégraphie silencieuse et hypnotique. Finalement, au nord, la vallée de L'Etivaz et le massif de la Gummfluh tentaient de prendre leur place dans ce panorama grandiose qui s'étendait à perte de vue.
Descente et Retour
Harcelé par le vent glacial qui interdisait toute pause digne de ce nom, j'ai contemplé rapidement l'exceptionnelle vue avant de reprendre, dans l'ensemble, mon tracé de montée. Pendant la descente, j'ai constaté, étonné, que les rafales avaient déjà effacé mes traces par endroits, comme si je n'avais jamais été là et que la montagne reprenait ses droits avec une rapidité déconcertante.
En arrivant à hauteur des chalets d'Isenau, le vent s'était pratiquement évanoui et le calme s'était réinstallé. C'était de nouveau un plaisir de traverser, d'un faux plat, le flanc occidental de La Palette dans cette quiétude retrouvée. Afin de profiter d'une descente plus douce et paisible, j'ai ensuite suivi le téléski jusqu'à La Marnèche, où j'ai récupéré le sentier pédestre, damé et confortable qui serpentait agréablement entre les arbres. Le retour jusqu'au Lac Retaud s'est donc révélé très évident et agréable.
Finalement, je suis retourné au point de départ en suivant l'itinéraire du sentier pédestre, alternant entre marche et glissades ludiques dans la poudreuse, savourant ces derniers instants de liberté hivernale avant de retrouver la civilisation et son agitation incessante, gravant dans ma mémoire les images saisissantes de cette journée passée en montagne.