Accès
Accès en voiture
Rejoindre Charmey par l'autoroute A12, sortie Bulle. Environ 2,5 km après le village, tourner à droite en direction du Gros Mont (panneau blanc). Suivre la route sinueuse, parfois étroite, sur environ 4 km jusqu'au parking des Planeys.
Accès en transports publics
De mi-juillet à mi-août, une ligne de minibus assure la liaison entre Charmey et la vallée du Gros Mont. La réservation est conseillée pour les voyageurs individuels et obligatoire pour les groupes de 3 personnes ou plus. Le nombre de places par trajet est limité à 8, mais un véhicule de renfort de 6 places peut être mis en service en cas de forte demande, portant la capacité totale à 14 places par trajet. Descendre à l'arrêt "Les Planeys".
Pour plus d'informations, consulter le site https://www.gruyerepaysdenhaut.ch/fr/mobilite/bus-charmey-gros-mont.
Des Planeys Dessous au Col de Tissiniva
Depuis les Planeys, une petite route s'élève en direction de la ferme. Après avoir dépassé les bâtisses, on gravit en lisière de forêt. Le chemin indiqué sur les cartes topographiques n'est pas immédiatement visible, mais on retrouve rapidement une belle trace qui rejoint le sentier pédestre à hauteur du pylône du monte-charge (P. 1193).
L'ascension se poursuit sur une épaule verdoyante, nichée entre deux zones boisées, jusqu'au Pâquier à Chevaux. Ce terme régional désigne "pâturage maigre" ou "l'étendue de terrain nécessaire dans un pâturage de montagne pour y nourrir pendant un temps donné une vache ou un cheval".
C'est à cet endroit que la Dent de Brenleire se dévoile dans toute sa splendeur. Son sommet se dresse fièrement, tandis que son flanc nord, abrupt et minéral, laisse apparaître les différentes couches géologiques qui le composent. On distingue également l'arête nord-ouest, mais il est difficile d'en évaluer la difficulté d'ascension.
Le cheminement se poursuit sur une route d'alpage, serpentant à travers les pâturages. Peu avant d'atteindre le chalet de la Grande Oudèche, la route croise un ruisseau à sec. Il s'agit d'un affluent sans nom du ruisseau du Gros Mont, qui rejoint ce dernier en aval, au niveau des Planeys Dessous. Juste après la traversée, il est temps de quitter la route d'alpage pour emprunter un sentier balisé. Il remonte le pâturage de la Grande Oudèche en suivant le lit asséché du ruisseau sur sa rive gauche. Le sentier n'est pas toujours bien visible, mais les traces de balisage facilitent le suivi de l'itinéraire.
Vers 1650 mètres d'altitude, après avoir franchi un tronçon raviné, j'ai égaré le sentier. Je suis resté sur la rive gauche du lit du torrent en suivant un semblant d'épaule. Un peu plus loin, le chemin est redevenu bien visible et m'a conduit jusqu'au tourniquet du col de Tissiniva (P. 1750). Ce toponyme, qui désigne plusieurs alpages aux alentours (Tissiniva, Tissiniva Derrey et Plan de Tissiniva), trouverait ses racines dans le gaulois "*tegesia nevia" signifiant "cabanes nouvelles", évoquant peut-être d'anciennes constructions d'alpage.
Du Col de Tissiniva à la Dent de Brenleire
L'arête nord-ouest de la Dent de Brenleire, d'abord large et verdoyante, s'affine et devient plus minérale avec l'altitude.
Dans un premier temps, j'ai remonté la pente herbeuse en me tenant à gauche, près de la clôture, où j'ai pu discerner par endroits une vague sente.
Au loin, la Dent de Folliéran, sœur jumelle de la Dent de Brenleire, mais à la silhouette plus élancée, se dessinait de plus en plus nettement. Son versant nord, tout aussi abrupt que celui de sa voisine, offrait un spectacle géologique fascinant, où les strates rocheuses semblaient avoir été sculptées par un artiste invisible.
À environ 1800 mètres d'altitude, le chemin traverse la clôture. Juste après, j'ai repéré un sentier bien marqué, absent des cartes topographiques, se faufilant dans les hautes herbes. J'ai progressé sans difficulté majeure, si ce n'est quelques endroits légèrement gras. Le sentier était bien balisé par des marques de peinture rouges et bleues, ainsi que par quelques cairns. Ces repères visuels m'ont été utiles à plusieurs reprises, tout particulièrement dans les parties rocheuses.
La difficulté s'accentue progressivement. Vers 1950 mètres d'altitude, l'itinéraire serpente sur une pente mi-herbeuse, mi-rocheuse. J'ai dû faire appel à mes mains pour m'aider à franchir certains passages, mais rien de bien technique jusque-là.
Plus haut, l'ambiance a changé. La pente s'est redressée, les vires sont devenues plus étroites et aériennes, offrant des vues vertigineuses sur les vallées environnantes. Les pierres se dérobaient plus facilement sous les pieds, exigeait plus d'attention accrue, surtout pour éviter de faire tomber des pierres sur d'éventuels randonneurs ou randonneuses situés en contrebas.
L'ascension s'est poursuivie par le franchissement de courts couloirs rocheux, nécessitant quelques pas d'escalade faciles (en I-II) et ludiques. Certaines vires, très aériennes et escarpées, exigeaient un pied sûr et un minimum de concentration. Malgré ces défis techniques, le balisage, bien que parfois délavé, indiquait clairement la meilleure voie à suivre.
Juste avant le sommet, j'ai contourné le contrefort rocheux en obliquant à gauche sur l'herbe jusqu'à rejoindre l'arête nord-est. De là, il ne restait plus qu'à gravir les derniers mètres sans difficulté pour atteindre la croix sommitale, qui offre un panorama est à couper le souffle.
J'ai été séduit par cette ascension, à la fois ludique et bien plus agréable que ce que j'avais imaginé. Je partage donc l'avis de Maurice Brandt qui, dans le Guide des Préalpes fribourgeoises, qualifie cette voie de "plus bel itinéraire" pour gravir la Dent de Brenleire.
Le nom de ce sommet, quant à lui, reste entouré de mystère. Certains y voient une dérivation du patois "brainlâ", signifiant "être en équilibre", évoquant peut-être la silhouette élancée de la montagne. D'autres penchent pour une origine germanique, avec une dérivation en "-arius" d'un nom de personne "Branlo", qui aurait ensuite été associé aux alpages et au sommet.
De la Dent de Brenleire à la Chaux de Brenleire
Le vallon des Morteys fait partie intégrante de la réserve naturelle du Vanil Noir. Ce havre de paix abrite une biodiversité exceptionnelle, qu'il est primordial de préserver. C'est pourquoi il est impératif de respecter la réglementation en vigueur, notamment l'interdiction de s'écarter des sentiers balisés. Cette mesure vise à préserver la tranquillité et l'intégrité du site, en particulier sa flore et sa faune. Le sentier qui serpente le long de l'arête sud, bien qu'il ne soit pas balisé, est clairement indiqué sur les cartes topographiques et donc autorisé.
La flore que j'ai observée sur cette arête faitière est d'une diversité et d'une richesse remarquables. Des tapis d'Aster des Alpes, aux pétales violacés, se mêlaient aux délicates corolles blanches du Céraiste alpin. Le Téphroseris en capitule, avec ses inflorescences jaunes éclatantes, apportait une touche de gaieté au paysage, tandis que l'Hélianthème jaune, plus discret, se fondait dans la roche. J'ai également eu la chance d'observer plusieurs Machaons (Papilio machaon), ces majestueux papillons aux ailes jaune vif et noir, ornées de queues en forme de spatule, virevoltant avec grâce et se nourrissant du nectar des fleurs.
Mais la véritable surprise de cette randonnée a été la rencontre avec l'une des plantes les plus emblématiques des montagnes, en partie en raison de sa rareté: l'Edelweiss. J'ai été étonné d'en trouver en abondance, de toutes tailles, isolés ou en bouquets. Cette fleur protégée, dont le nom signifie "noble blanc" en allemand, est un véritable symbole de pureté. Ses feuilles argentées et ses capitules étoilés, recouverts d'un duvet cotonneux, lui permettent de résister aux conditions climatiques extrêmes de la haute montagne.
La descente, par l'arête sud, a débuté sous les meilleurs auspices. Le sentier, bien tracé, offrait une progression aisée, me permettant de profiter pleinement de la flore et du panorama grandiose qui s'étendait à mes pieds. Soudain, un bruit de pierres dégringolant a rompu le silence. En scrutant les environs, j'ai aperçu une harde de chamois évoluant avec une agilité déconcertante sur un névé dans le couloir d'Entre Roches. Parmi eux, des cabris, déjà très à l'aise sur ce terrain escarpé, sautaient et couraient avec une énergie débordante. C'était un spectacle magique, un de ces moments privilégiés que seule la montagne peut offrir.
La descente s'est poursuivie sans encombre jusqu'à environ 2320 mètres d'altitude, où l'arête s'est interrompue par une barre rocheuse infranchissable. Le sentier, habilement aménagé, contourne cet obstacle par la droite (à l'ouest), puis rejoint l'arête sud par une traversée aérienne et légèrement exposée.
Malgré le vide et l'exposition, je n'ai rencontré aucune difficulté particulière jusqu'à environ 2210 mètres d'altitude, où l'arête change de direction pour s'orienter vers le sud-est. J'avais lu dans le guide du CAS que l'itinéraire par l'arête sud était "la voie la plus simple mais peu intéressante dans des gazons glissants". J'avais également entendu plusieurs randonneurs se plaindre de ce parcours, jugé désagréable malgré un sentier bien marqué. Je pensais qu'il s'agissait d'une légende urbaine ou de l'avis de personnes peu habituées aux terrains escarpés, mais force a été de constater que la réalité avait rejoint la fiction. La deuxième partie de la descente, sur l'arête sud-est, s'est avérée particulièrement pénible.
À deux reprises, j'ai légèrement glissé, exécutant malgré moi quelques pas de danse improvisés. Fort heureusement, personne n'était là pour assister à ce spectacle peu gracieux. Les petites glissades se sont produites sur des portions moins exposées et, grâce à mes bâtons de randonnée, j'ai pu me rattraper sans encombre. Mais selon l'endroit, une chute aurait pu entraîner des conséquences plus fâcheuses. Le problème ne venait pas tant du terrain, qui était sec, que de la nature de la roche, par endroits particulièrement glissante. Peut-être était-ce dû à l'usure causée par le passage répété des randonneurs, ou à la composition particulière de la roche. Quoi qu'il en soit, je déconseille fortement cette descente par temps humide, où les risques de glissade seraient décuplés.
De la Chaux de Brenleire aux Planeys Dessous
Vers 2000 mètres d'altitude, l'horreur a pris fin. Le sentier, délaissant l'arête escarpée, s'est aventuré dans l'alpage de Chaux de Brenleire, un vaste plateau verdoyant. Le terme "chaux", dérivé du gaulois "calmis", désigne dans cette région un pâturage d'altitude, situé au-dessus de la limite des arbres, à proximité des sommets.
L'alpage, baigné de soleil, dégageait une atmosphère paisible et sereine. Le silence n'était troublé que par le bourdonnement des insectes et le murmure du vent. En m'avançant, j'ai aperçu les vestiges d'un ancien chalet d'alpage, témoin silencieux d'une époque révolue.
Le tintement des cloches des vaches, de plus en plus proche, annonçait une rencontre imminente. Peu après avoir franchi le fil électrique, j'ai aperçu le troupeau, paisiblement occupé à brouter l'herbe autour du Chalet de Brenleire Dessus (P. 1706). Ce moment délicat, où il faut traverser un troupeau en liberté, a suscité son lot d'interrogations. Les vaches allaient-elles s'approcher, intriguées par ma présence? L'une d'elles allait-elle s'effrayer et entraîner les autres dans une course folle, me mettant en danger? Tandis que je progressais lentement, essayant de ne pas perturber leur quiétude, une autre question me trottait dans la tête. Les alpages de Brenleire font partie intégrante de la réserve naturelle du Vanil Noir, où il est strictement interdit de quitter les sentiers pour préserver la flore. Mais qu'en est-il des vaches? Ne causent-elles pas de dommages en broutant et en piétinant l'herbe? Je sais, je me pose parfois trop de questions…
J'ai traversé le troupeau sans encombre, sous le regard placide de ces imposantes créatures. Au niveau du chalet, j'ai suivi un chemin carrossable qui serpentait à travers les pâturages, me menant jusqu'à proximité du Chalet de Brenleire Dessous. Un panneau en bois artisanal, peint en rouge bordeaux, indiquait la direction à suivre à travers la prairie. Une sente bien marquée et quelques traces de peinture sur les rochers m'ont guidé au départ, mais le chemin a rapidement disparu dans l'herbe, tout comme le balisage. J'ai continué en direction du nord-est jusqu'à atteindre la lisière de la forêt, où une clôture de barbelés marquait la frontière entre le monde sauvage et le monde domestiqué.
Un passage avait été aménagé dans la clôture, mais il était dissimulé par des branches tombées. Une fois dans les sous-bois, le sentier est redevenu facile à suivre et m'a conduit jusqu'à la route du Gros Mont, à l'extrémité nord du plateau (P. 1365). L'endroit est également le terminus de la navette en provenance de Charmey. Ayant laissé ma voiture aux Planeys Dessous, à environ 2 km de là, j'ai emprunté le sentier pédestre qui longe la route asphaltée, avec quelques raccourcis dans la forêt qui permettent d'éviter des boucles de route.