Lors d'une balade familiale en forêt, j'ai été consterné par la quantité de bouts de papier blanc qui jonchaient à proximité du chemin. Quand l'impératif de faire ses besoins survient, la meilleure solution reste de se rendre dans des toilettes publiques. Des applications pour smartphone comme "Toilet Finder" peuvent vous aider à localiser les sanitaires les plus proches.

Cependant, les WC ne poussent pas comme les arbres et il est parfois impossible d'attendre plus longtemps, obligeant à recourir à la nature. De nombreux articles de blogs et journaux présentent différentes techniques pour se soulager dans les bois. Il existe même un livre écrit par Kathleen Meye intitulé "How to Shit in the Woods: An Environmentally Sound Approach to a Lost Art". Il a été vendu à plusieurs millions d'exemplaires et traduit en français sous le titre "Comment chier dans les bois: Pour une approche environnementale d'un art perdu".

J'ai pu lire quelques extraits de l'ouvrage. Les sujets abordés sont intéressants, mais certains passages sont trop détaillés et peuvent s'avérer lourds et ennuyeux. De plus, l'humour utilisé peut devenir lassant à la longue. C'est pourquoi j'ai décidé de ne pas acheter cet ouvrage de 130 pages et de me renseigner à partir de différentes sources bibliographiques afin de comprendre les impacts sur l'environnement et les meilleures pratiques pour se soulager dans la nature tout en minimisant notre empreinte écologique.

L'inconfort visuel et les temps de décomposition

L'urine s'infiltre dans la terre, contrairement aux selles et au papier toilette (ou aux mouchoirs) qui restent en surface. Ces derniers, en plus d'être inesthétiques, mettent du temps à se décomposer. En effet, les déjections humaines ainsi que le papier toilette et les mouchoirs ne se dégradent pas complètement avant un an. Ce délai peut varier beaucoup en fonction de plusieurs facteurs, tels que la nature du sol, l'exposition aux éléments, la population animale et bactérienne, etc.

Le papier toilette, bien que préférable aux mouchoirs en papier, reste visible pendant plusieurs mois, ce qui pose un problème particulièrement préoccupant dans les zones fréquentées par de nombreux randonneurs et randonneuses, où l'accumulation peut devenir importante.

Les risques sanitaires

Si le besoin de se soulager est naturel, il ne faut pas négliger les risques sanitaires liés aux excréments humains.

L'urine peut contenir des traces de médicaments, d'hormones, d'additifs alimentaires et des résidus de pesticides. La minéralisation dans le sol les détruit généralement, mais le pipi est riche en azote, ce qui peut perturber l'équilibre des plantes. Verser un peu d'eau dessus permet de réduire ce problème.

Les selles, quant à elles, renferment toutes les substances nocives que le corps humain ne peut pas digérer. Parmi celles-ci, on trouve des virus, des bactéries et des parasites comme les protozoaires. En moyenne, 5 à 13 % de la masse des fèces est constituée de micro-organismes, ce qui représente une quantité importante!

Le problème devient particulièrement grave lorsque ces germes pathogènes se retrouvent dans des milieux où ils ne sont habituellement pas présents.

En plus de la pollution visuelle, les excréments peuvent contaminer le sol et l'eau. Si des germes pathogènes parviennent à un cours d'eau, ils peuvent se propager rapidement, survivre pendant plusieurs mois et infecter les humains et les animaux sauvages. Diarrhées, maux de ventre, fièvre, vomissements, gastro-entérites et autres affections sont autant de risques potentiels liés à la contamination par des déjections humaines.

Comment se soulager dans la nature

Pour éviter les problèmes visuels et sanitaires, il est essentiel d'adopter quelques gestes simples, mais importants. Gardons à l'esprit que la solution la plus facile pour nous n'est pas toujours la meilleure pour l'environnement.

L'objectif principal est de favoriser une décomposition rapide des excréments tout en limitant la dispersion des micro-organismes.

Les préparatifs

Lorsque vous vous apprêtez à vous soulager dans la nature, il est primordial de prévoir le matériel nécessaire.

Pour uriner, les hommes n'ont besoin que d'un produit désinfectant ou de savon. En revanche, les femmes devraient avoir en plus avec elles des sachets en plastique refermables et du papier hygiénique ou un "pee rag".

En ce qui concerne la défécation, il est recommandé d'avoir des sachets en plastique refermables, du papier toilette, une petite pelle ou un bâton, ainsi qu'un produit désinfectant ou du savon.

Choisir un emplacement

Afin de préserver l'environnement, il est recommandé de s'éloigner d'au moins 70 mètres des cours d'eau et des rives des lacs. Il est également important de maintenir la même distance minimale par rapport aux sentiers de randonnée.

Cette consigne peut être difficile à respecter dans les zones protégées où il est strictement obligatoire de rester sur les chemins autorisés. Dans ce cas, il est préférable de quitter la réserve naturelle pour trouver un endroit plus adapté. Évitez en particulier de pénétrer dans des milieux sensibles tels que les marais et les prés maigres.

Pour votre sécurité personnelle, soyez attentif aux éventuels nids de guêpes ou de bourdons, aux fourmilières et aux champs d'orties.

Cherchez un emplacement abrité, offrant plus d'intimité, comme derrière des rochers ou des arbres.

Uriner dans la nature

Pour les hommes, faire pipi est une tâche simple: il suffit de baisser la braguette, de se soulager et de se laver les mains (voir la section dédiée).

Pour les femmes, uriner peut être presque aussi complexe que de déféquer. En plus de devoir trouver une position confortable, elles utilisent généralement du papier toilette pour s'essuyer. Idéalement, il est conseillé d'avoir un sac en plastique pour y mettre le papier usagé, l'emporter avec soi et le jeter une fois rentré à la maison.

Comme alternative au papier hygiénique, vous pouvez recourir à un "pee rag", ou "chiffon à pipi". Après usage, laissez de préférence sécher le chiffon au soleil, puis nettoyez-le chez vous dans la machine à laver.

Si vous n'avez pas de sacs en plastique, référez-vous à la section "déféquer dans la nature" pour savoir comment vous débarrasser correctement des papiers usagés à l'endroit où vous avez uriné.

Déféquer dans la nature

Avant tout, il est important de vous renseigner préalablement sur les règles spécifiques en vigueur dans le lieu que vous visitez, auxquelles vous devrez vous conformer. Par exemple, il peut être obligatoire de ramasser vos déchets, de les placer dans un sac en plastique et de les jeter une fois hors de la réserve naturelle.

Creuser un trou

Choisissez un endroit abrité des regards et ensoleillé, de préférence avec un sol meuble, sans racines ni rochers. La lumière du soleil et un sol sain favorisent une décomposition plus rapide.

Ensuite, creusez un trou d'à peu près 10 à 20 cm de profondeur et autant en largeur. Utilisez une petite pelle ou une branche pour le faire. Assurez-vous qu'il soit assez grand pour que vous puissiez facilement le viser une fois accroupi, et suffisamment profond pour contenir vos excréments (un caca moyen pèse environ 250 g) et éviter d'attirer les animaux.

Faire ses besoins

Pour effectuer vos besoins dans des conditions optimales, il est essentiel de trouver une position confortable. Vous devrez maintenir cette position pendant plusieurs minutes, le temps de tout sortir et de vous essuyer.

Vous pouvez simplement vous accroupir, mais cela peut être peu pratique et risque de causer des crampes. Je recommande de vous tenir à une branche ou un tronc. Cette posture ne requiert pas beaucoup de force, mais vous devrez lâcher une main pour vous essuyer.

Une autre option est de vous appuyer contre un tronc ou un rocher. Cette position offre l'avantage d'avoir les deux mains libres, mais elle demande une certaine force dans les jambes.

Je vous conseille d'essayer ces différentes postures préalablement pour déterminer celle qui vous convient le mieux.

Une fois que vous êtes confortablement positionné au-dessus du trou, déféquez directement dedans. Si vous manquez la cible, utilisez un bâton pour faire tomber vos excréments au fond de la cavité.

S'essuyer

Employez uniquement le papier toilette pour vous essuyer. Même si vous avez vu des gens utiliser des feuilles d'arbres ou de plantes dans les films, évitez cette pratique. À moins d'avoir une connaissance approfondie de la végétation environnante, ne prenez pas ce risque. Vous pourriez vous retrouver avec une irritation dans ce qui est probablement le pire endroit pour en avoir...

Les avis divergent concernant le traitement du papier toilette usagé. Beaucoup recommandent de le mettre dans un sac plastique, puis de placer ce dernier dans un autre sac plastique pour empêcher les fuites d'odeur, d'emporter le tout et de le jeter dans une poubelle ou à votre retour chez vous.

Autrefois, il était courant de brûler le papier toilette, mais cette pratique est désormais à proscrire en raison du risque accru d'incendies de forêt (et du fait que le papier sale brûle mal).

En alternative, vous pouvez laisser le papier toilette (idéalement écologique ou spécialement conçu pour les fosses septiques pour une dégradation plus rapide) dans le trou (le papier n'est rien d'autre que de la cellulose de bois). Pour favoriser la décomposition, il est préférable de mélanger le papier toilette avec les excréments en utilisant un bâton.

Enterrer les selles

Pour des raisons d'hygiène, il est impératif d'enterrer les selles. En procédant ainsi, vous réduisez le risque que quelqu'un puisse marcher dedans, tout en évitant la dispersion des maladies et des germes.

Recouvrez vos excréments avec la terre extraite pour faire le trou, puis camouflez le tout avec des branches, des feuilles et des cailloux. Cette méthode empêchera également les animaux de creuser le sol.

Nettoyer les mains

Après la petite ou grande commission, il est important de nettoyer les mains. Le plus rapide c'est d'utiliser du produit désinfectant, conservé avec le reste de votre équipement. Pour éviter à toucher le flacon avec des mains sales, il est recommandé d'utiliser une seule main quand vous allez aux toilettes, puis d'utiliser l'autre pour manipuler le désinfectant. Le plus pratique est d'ouvrir la bouteille avant ou de demander de l'aide à un ami.

Une autre option est d'utiliser du savon et de demander à quelqu'un de verser de l'eau sur vos mains. À noter que le savon et l'eau sont plus efficaces que le désinfectant!

Dans tous les cas, évitez de vous nettoyer les mains dans un cours d'eau afin de ne pas le contaminer.